© Patricia Huguenin et Audrey Margand

Nuit blanche avec le castor

Deux photographes romandes bravent la tempête pour dévoiler la vie nocturne d’un clan de castors. Affût sous les flocons avec le duo Huguenin & Margand.

Deux photographes romandes bravent la tempête pour dévoiler la vie nocturne d’un clan de castors. Affût sous les flocons avec le duo Huguenin & Margand.

Le gel rougit le nez et y pend sa goutte. Par ce froid de canard, les mots pantoufles, canapé et cheminée font envie. Mais notre passion de nature est trop forte. Chaudes doudounes, doubles couches en mérinos, chaussettes de grands-mères, bottes et écharpes roses pour garder un zeste de féminité… Et nous voilà parties en quête du castor.

Les repérages sur la berge ont lieu de jour. Aucune chance alors de croiser le gros rongeur, mais la rivière offre d’autres jolies rencontres. En automne par exemple, c’est le moment du frai pour les grandes truites lacustres. Ces courageuses écailleuses se lancent dans la remontée aventureuse du cours d’eau. Elles n’hésitent pas à sauter à de nombreuses reprises hors de l’eau, avec une énergie impressionnante, pour tenter de surmonter les obstacles. Hélas, très souvent sans succès vu la hauteur des chutes artificielles. Heureusement, elles finissent par les contourner grâce à des passes à poissons construites pour elles.

Dans une ambiance féerique

Traces de dents au pied des arbres, troncs abattus, branches complètement épluchées… Le domicile des rongeurs n’est plus très loin. Quelques dizaines de mètres en aval, nous arrivons à un tas de bois quelque peu désordonné situé dans l’eau et adossé contre la rive: la hutte des castors. En 10 ans, sa taille a pris une ampleur considérable.

Nous avons tiré le portrait de cette famille au printemps, en été et en automne. Mais que font-ils en hiver lorsqu’il neige ? Intriguées par cette question, nous reviendrons à la première tempête. La météo annonce enfin l’arrivée d’une perturbation. Bien emmitouflées, nous partons à l’affût en fin de journée. Les gros flocons tant espérés ne tardent pas à tomber et nous couvrent rapidement d’une couette blanche. Couchées sur la rive, nous attendons dans une ambiance féerique. L’eau et le temps s’écoulent tout doucement. La position s’avère inconfortable, le mal au dos nous taraude et nos orteils transis s’évanouissent. Pas grave, vers 21 h, un plouf sourd rompt le silence. Un castor est sorti de la hutte.

A partir de cet instant, les allées et venues des rongeurs se succèdent. Nous oublions immédiatement le froid mordant. Les adultes grignotent des branchettes de saule en se laissant recouvrir de neige comme nous. Nous sourions à la vue des jeunes de l’année qui paraissent découvrir pour la première fois cet élément froid et léger. Ils font des petits sauts et mordillent des morceaux de glace qui crissent sous la dent. Nous en profitons pour prendre quelques clichés avec un flash déporté. Les éclairs ne semblent pas les perturber tant ils sont occupés à leur repas et à leurs jeux. Nous repartons discrètement, comblées par cette soirée mémorable. A la prochaine tempête de neige, c’est sûr nous y retournons.

Bâtisseur de vie

Le castor est un bûcheron infatigable. En deux nuits de travail, il peut abattre un arbre de 60 cm de diamètre pour se nourrir de son écorce et de ses bourgeons. Longtemps considéré comme une source de dégâts, ce rongeur est au contraire un précieux allié de la biodiversité. Il entretient les berges, favorise le renouvellement de la forêt et ouvre des clairières favorables aux fleurs aimant le soleil. Ses digues et les eaux stagnantes qu’elles retiennent sont une aubaine pour la végétation aquatique et constituent des sites de frai idéaux pour les poissons. Ne pleurez donc pas pour les arbres rongés. Symboliquement, leur mort amène la vie.

Votre premier castor ce soir ?

Contrairement à sa cousine la marmotte, le castor d’Europe n’hiberne pas. Il est donc possible de le rencontrer toute l’année. Pour espérer apercevoir ce végétarien aux mœurs nocturnes, repérez les indices de sa présence sur les rives de lacs, étangs, rivières à courant lent ou canaux d’irrigation. Mettez-vous ensuite à l’affût, en veillant à garder une certaine distance pour ne pas effrayer les animaux. Des jumelles peuvent être utiles pour observer le castor nager à fleur d’eau. Au clair de lune, le spectacle peut se poursuivre pendant la nuit. Pensez à prendre une torche électrique pour retrouver le chemin de retour.

Propos recueillis par Alessandro Staehli

Nuit blanche à l'affût des castors - La Salamandre Patricia Huguenin Audrey Margand
Patricia Huguenin & Audrey Margand

Patricia Huguenin et Audrey Margand

huguenin-margand.com

1957 Naissance de Patricia à Couvet (NE)

1977 Naissance d’Audrey à Genève

2007 Rencontre lors d’un voyage nature en Roumanie

2008 S’associent et cosignent leurs photographies

Pour pister vous aussi le castor, lisez le Miniguide n°57 Sur les traces du castor et pour découvrir la vie quotidienne du castor, DVD Les nouveaux castors.

Couverture de La Salamandre n°237

Cet article est extrait de la Revue Salamandre

n° 237  Décembre 2016 - Janvier 2017

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