Jamais sans mon fils!

Anne-Françoise Perrot-Julmy s’est consacrée à 100% à son fils. Sans elle, La Salamandre n’aurait peut-être pas existé. Sans lui, la mère n’aurait pas eu la même vie. Interview.

Anne-Françoise Perrot-Julmy s’est consacrée à 100% à son fils. Sans elle, La Salamandre n’aurait peut-être pas existé. Sans lui, la mère n’aurait pas eu la même vie. Interview.

Comment était Julien enfant, avant qu'il crée son magazine ?

A cause de son handicap oculaire, c'est un enfant qui a été solitaire, très rapidement plongé dans les livres. Toujours à quatre pattes, que ce soit dans sa chambre ou à l'extérieur, il observait le monde des minuscules à travers ses lunettes à verre épais. Seules les petites bêtes lui étaient disponibles. Les plus grosses, il ne les voyait pas.
Sa très forte myopie a été diagnostiquée très tôt... Il devait avoir quatorze mois environ. Le premier diagnostic posé le pronostiquait complètement aveugle à douze ans. On nous a dit alors : « Soit il sera autiste, soit il sera meilleur que les autres . » Voilà qui était clair: pour suivre un enseignement normal, il allait falloir livrer un combat acharné.

Peu de relations avec d'autres enfants, ou avec ses frère et sœur ?

Guillaume et Stéphanie, ses aînés de sept et neuf ans, voyaient en lui un enfant un peu ennuyeux. Il parlait comme dans un livre ! La distance — ils vivaient avec leur père — les a aussi éloignés. De fait, Julien était presque enfant unique. Quant aux autres enfants, que faire avec un petit garçon binoclard qui ne voyait pas le ballon ? A part quelques amis avec qui il fondera un groupe de « Castors juniors », il a eu peu d'attaches jusqu'à l'adolescence.

Votre déménagement à Aubonne, non loin de Lausanne, sera déterminant pour Julien...

J'y ai pris un appartement seule avec lui alors qu'il avait dix ans. Il a fallu beaucoup l'accompagner au début sur le chemin de l'école, car il se perdait. Une fois qu'il a trouvé ses repères, c'était bon. Il fallait lui faire confiance, qu'il trouve lui-même ses marques ! C'est à Aubonne qu'il rencontrera Jean-Claude Collet. Son instituteur lui a fait découvrir la nature, ainsi qu'à ses autres élèves. Il deviendra un véritable ami. On faisait des « Soupers Collet » avec toute sa famille.

Vous-même l'avez beaucoup accompagné sur le terrain.

Il lui était impossible d'y aller seul: il était très jeune. Julien avait une autorisation pour emporter les bestioles qu'il ramassait à la maison, où il pouvait les étudier. Mais après, il fallait les rapporter dans la nature, là où on les avait trouvées. Et là, c'est moi qui m'y collais pendant qu'il était à l'école (rires)  !

Puis est venue l'adolescence. Des crises durant cette période ?

Des prises de bec, il y en a eu a toutes les époques, car c'est un personnage têtu qui ne lâche pas prise. Mais pas plus à l'adolescence. Il était mûr avant l'âge. Julien a vécu son adolescence durant son enfance. A 13-14 ans, je dirais plutôt qu'il s'est complètement épanoui. Cela a été la période des premières télés, où il s'exprimait comme un adulte, un rien donneur de leçons mais très engagé. Aujourd'hui, il n'a d'ailleurs pas changé d'un iota le contenu de ses propos.

Le temps des premiers abonnés...

Je me rendais à la poste avec des sacs Migros bourrés de numéros à envoyer. Auparavant, je les avais photocopiés le dimanche à mon travail – il y a prescription – puis agrafés.

Quelques années plus tard, les études à Neuchâtel. Le grand départ ?

Pour lui comme pour moi. J’ai enfin pu partir vivre avec mon second mari dans sa maison du pied du Jura. Auparavant, même depuis notre mariage, je m’y étais refusée pour être à 100% disponible pour Julien. C’est une amie journaliste, Anne-Françoise Hebeisen, qui avait dit à Julien qui persévérait dans son aventure journalistique : « D’abord des études de biologie, sinon tu ne seras pas crédible . » Il a suivi cette recommandation pleine de sagesse.

Vous avez encore soutenu votre fils durant de nombreuses années...

Un Conseil a été créé par Julien pour remettre ses choix en question. J’en ai fait partie longtemps, avec mon second mari Jacques Julmy. Pour les autres membres, j’étais en quelque sorte la « mémoire » de La Salamandre. Aujourd’hui, j’ai 74 ans et je suis ces aventures de bien plus loin. Julien ne me raconte plus autant qu’avant. Mais qu’est-ce que j’ai pu faire de belles rencontres grâce à lui ! Je n’aurais jamais eu la vie que j’ai eue sans lui.

Couverture de La Salamandre n°218

Cet article est extrait de la Revue Salamandre

n° 218  Octobre - Novembre 2013
Catégorie

Julien Perrot

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