© Sylvain Ursenbacher

La vipère qui fait Walser

Après le brochet aquitain et l’orvet de Vérone évoqués tout récemment dans la Salamandre, la vipère des Walser fait son entrée dans la biodiversité européenne.

Après le brochet aquitain et l’orvet de Vérone évoqués tout récemment dans la Salamandre, la vipère des Walser fait son entrée dans la biodiversité européenne.

Sylvain Ursenbacher
Sylvain Ursenbacher, herpétologue et chercheur à l’université de Bâle / © Stéphanie Urech

Sylvain Ursenbacher, la vipère des Walser vient d’être décrite en Italie au Piémont. Comment cette nouvelle espèce a-t-elle été découverte ?

Depuis longtemps, des différences morphologiques sont observées entre les vipères péliades du Piémont et celles du reste du pays. Des analyses génétiques viennent de prouver que ces individus appartiennent à une autre espèce que nous avons appelée Vipera walser.

Pourquoi ce nom ?

En l’honneur des Walser, ce peuple médiéval germanophone qui habitait plusieurs régions alpines de Suisse, d’Autriche et d’Italie, notamment les vallées piémontaises au nord de Biella qui abritent cette vipère.

Comment la reconnaît-on de la péliade?

Elle lui ressemble beaucoup. Son corps est plutôt brun et son dos porte un zigzag brun foncé à noir. Comme chez la péliade, son nez est légèrement retroussé. Les quelques différences au niveau du nombre d’écailles demandent une observation minutieuse qui implique la capture de l’animal. C’est donc l’affaire de spécialistes.

La répartition reste le critère le plus facile pour la reconnaître : dans la zone du Piémont entre la Vallée d’Aoste et Domodossola, la péliade n’est pas présente et seule la vipère des Walser a été trouvée. Elle habite en général au-dessus de 1000 m, dans des zones ouvertes comme des prairies ou des pierriers.

Est-il vrai qu’elle viendrait du Caucase?

Oui, c’est une grosse surprise. La vipère des Walser a des liens de parenté avec des espèces aujourd’hui exclusivement caucasiennes comme Vipera kaznakovi. Malgré une forte ressemblance avec la péliade, ce reptile serait une cousine éloignée différenciée il y a plus de 3 à 4 millions d’années. Quant à l’aspic, elle est probablement apparue plus tôt et a des origines méditerranéennes.

De plus en plus, la génétique dévoile l’existence de vertébrés jusque-là passés inaperçus…

En effet, les analyses ADN constituent un outil supplémentaire pour les biologistes. Elles nous permettent de mieux comprendre et protéger le monde qui nous entoure, à l’image de la vipère des Walser. Dans d’autres domaines, ces méthodes moléculaires peuvent nous fournir des informations sur les flux de gènes entre des populations, nous montrer des barrières à la migration voire élucider des phénomènes historiques… On est aussi désormais capables de détecter une espèce uniquement par l’analyse des poils ou des crottes, sans qu’on ne l’ait observée directement. Mais l’expérience du naturaliste demeure indispensable.

Ces découvertes représentent une bonne nouvelle pour la biodiversité ?

D’une part, elles sont positives, car on connaît mieux la biodiversité. Mais ça ne veut pas dire que cette dernière a augmenté. Ces animaux existent depuis très longtemps mais n’avaient tout simplement pas encore été identifiés.

Faut-il s’attendre à d’autres découvertes prochainement ?

Nous commençons à nous rendre compte que la systématique des espèces européennes est un peu plus complexe que précédemment imaginé. Par exemple, une étude sur les deux sous-espèces de couleuvres à collier présentes en Suisse suggère fortement que les deux formes sont en fait des espèces différentes. Affaire à suivre.

Lire aussi notre interview sur le brochet aquitain et retrouvez dans la Salamandre 235 notre article sur l'orvet de Vérone.

Vipère des Walser forme mélanique
Vipère des Walser forme mélanique / © Sylvain Ursenbacher
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Sciences

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